Sylvain Gbaka, l’art de la scène

Cheveux grisonnant, le visage marqué par quelques rides, le regard vif, Sylvain Gbaka est un artiste comédien et metteur en scène ivoirien pour qui les planches n’ont plus de secret. A l’aube de la soixantaine, il continue d’exercer sa passion avec fougue. Son potentiel vocal, sa capacité à interpréter un personnage à la perfection lui permettent de parcourir le monde et d’accumuler les expériences. Et pourtant, plus jeune, il ne s’imagine pas un seul instant un tel destin. Nostalgique, il explique comment tout a commencé pour lui.

« C’est depuis l’école, dans les années 80 que j’ai découvert le théâtre. A l’époque, j’étais en classe de 6ème et mon école devait présenter un spectacle au Festival de Théâtre Scolaire et Universitaire à Bouaké. Mon professeur de français qui dirigeait la troupe de l’école, m’a demandé de participer aux répétitions parce qu’il voyait en moi quelques talents. Mais je lui ai dit Non parce que je ne rêvais pas du tout de faire du théâtre. J’avais d’autres ambitions ».

Plus tard, son professeur revient à la charge et menace de le punir s’il n’obtempère pas. « Il m’a dit : tu crois que tu vas faire quoi dans ta vie? Je ne savais pas où il voulait en venir mais j’ai fini par aller au théâtre pour ne pas avoir des points en moins sur ma note de conduite », se souvient-il en éclatant de rire.

Pendant les premières répétions, il se fait rapidement remarquer. Sa capacité à donner vie à son personnage lui permet de se placer au centre de toutes les attentions. La première représentation de la troupe est un véritable succès.

« Ce jour-là, on a joué devant le maire de la ville et d’autres personnalités. J’ai été très applaudi par le public. Tout le monde criait mon nom et ça m’a beaucoup plu. Je crois d’ailleurs que c’est ce qui m’a retenu. J’ai décidé de continuer avec le théâtre pour être toujours applaudi », raconte-t-il tout sourire.

Quelques années plus tard, il abandonne l’école et décide de poursuivre son nouveau rêve. Pour y arriver, il débarque à Abidjan et rejoint la compagnie artistique « les griots culturels de Cocody » grâce à une personne qu’il connaît. Il fait une tournée nationale en jouant dans la pièce « le cercle de craie caucasien » de Bertold Brèch. Il apprend sur le tas, mais se retrouve très vite envahit par le désir de suivre une formation qualifiante dans le domaine pour mieux valoriser son talent. Il confie

« J’ai eu l’opportunité de travailler avec Rose Marie Guiraud qui cherchait à expérimenter une espèce de comédie musicale. Du théâtre et de la danse. Elle m’a appris à danser, à chanter et à faire du théâtre. Ça a été une belle expérience parce qu’on a joué dans la plus grande salle d’Abidjan à l’époque, le Palais des Congrès de l’Hôtel l’Ivoire. Avec elle j’ai beaucoup appris », relate-t-il.

Sylvain Gbaka enchaîne les performances. Sur scène, il s’abandonne entièrement et se donne corps et âme. Sollicité de parts et d’autres il voyage à travers le monde et découvre de nouvelles réalités. D’une compagnie artistique à une autre, il finit par créer sa propre troupe avec l’aide de ses compagnons de route pour mieux vivre de son art. Le « Ymako Théatry » voit le jour en 1994. Les premières récompenses ne tardent pas :

 « On a décidé de créer Ymako Théatry pour faire de la sensibilisation environnementale et du théâtre pour le développement. L’objectif était que la population se sente directement concernée par les sujets que nous mettions en scène. Nous avons pu participer au Festival International de Théâtre pour le Développement à Ouagadougou avec une pièce intitulée « Le Prophète Sery Gbalou ». Puis on s’est retrouvé au MASA où nous avons décroché le premier prix du théâtre vivant RFI en 1995 ».

Plus tard, sa compagnie connaît un véritable succès grâce à la mise en scène de la pièce « La Légende de Kaidara » de l’écrivain Amadou Hampate Ba. Cette œuvre lui permet de faire plus de 150 représentations à travers le monde avec sa troupe.

En 1998, il élargit ses compétences en participant à un stage de perfectionnement des jeunes metteurs en scène africains. Il devient officiellement metteur en scène professionnel et  remporte le 1er  prix du Festival International de Mono Théâtre en Allemagne pour son adaptation de l’œuvre « La mort ne veut pas de moi » de Yolande Mukagasana.

Voyager, transmettre …

Au fil des années, son art se bonifie. Il collabore avec plusieurs compagnies artistiques. Malgré les difficultés qu’il rencontre au quotidien et la malhonnêteté de certains collaborateurs, il surmonte l’envie d’abandonner et s’accroche davantage à sa passion. Puis un jour, il atterrit au cinéma.

 « Le théâtre m’a fait voyager mais c’est le cinéma qui m’a fait connaître. Je suis allé vers le cinéma parce que je voulais avoir plus de notoriété. Et ça a marché », confie-t-il.

D’abord, des petits rôles, ensuite de la figuration, puis des rôles plus importants. On le retrouve dans plusieurs séries à succès telles que « Cacao », « MTV Shuga Babi », « Ma grande famille » ou encore « Invisibles ». Le poids de l’âge n’affecte en rien la qualité de son travail. Son plus grand rêve est de transmettre tout ce qu’il a appris à la jeune génération.

« La seule chose que je peux donner sans jamais m’appauvrir c’est ce que je sais faire. La connaissance est intarissable. Et j’aimerais transmettre mon savoir à tous les jeunes passionnés. Je travaille également sur de nouveaux projets personnels comme l’enregistrement d’un conte intitulé Zakwato. Je vais l’enregistrer ou le jouer sur scène », projette-t-il.

Membre de la compagnie « Allemand Production », Sylvain Gbaka vit pleinement de son art et continue de faire des étincelles. Son seul regret, c’est de ne pas avoir un agent qui l’aide à mieux s’organiser.

Rachidath BOURAÏMA

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