Parker Bakayako : Ex migrant engagé pour les jeunes

À Abobo , une commune de la ville d’Abidjan, sur des murs ornés aux couleurs variées, on peut lire « Abobo la joie, Abobo la paix, ou “Abobo ê Zo” (ndlr, Abobo est beau)». Le chef-d’œuvre donne un nouveau visage, une fière allure à cette commune, qui jusque-là est victime de préjugés. Ces décors sont l’œuvre de Parker. Un jeune migrant de retour après des périples dans le Maghreb. Avec son pinceau et son rouleau, Parker, passe des couches de couleur sur des endroits sombres de sa commune, mais aussi de sa vie. Il s’est résolu depuis son intégration à montrer les risques liés à la migration clandestine. Mais aussi présenter des opportunités que l’on peut (se) créer en restant dans son pays

« Parker, il a du cœur. C’est un combattant », loue avec fierté, Gordani, un aîné vivant à N’Dotré, un sous-quartier de la commune d’Abobo. Sous le hangar, des jeunes admiratifs acquiescent. Dreadlocks, regards perçants, sourire aux lèvres… Parker suit avec attention les témoignages de ses pairs ; les yeux plongés dans le film de sa vie d’aventurier. Ses premières phrases retracent ses difficiles débuts dès son retour en 2018. Le jeune homme doit tout recommencer. Mais aussi traverser de nouvelles épreuves : faire face au poids de son échec dans la quête de l’eldorado, le souvenir des souffrances endurées dans le désert, le regard de la société sur son nouveau statut. Et surtout, les promesses d’aides du gouvernement ivoirien et des structures de réinsertion, qui peinent jusque-là à se concrétiser. Pour lui, « il ne faut pas s’apitoyer sur son sort ».

Parker, c’est aussi, un jeune qui par force de caractère, n’a pas peur de repartir à zéro. L’espoir, la persévérance, l’audace, associés à sa capacité d’adaptation et d’apprentissage étaient pour lui, le sésame de tous les possibles. Juillet 2020. Deux ans plus tard, la vie lui sourit. « À mon retour, j’ai été accueilli par l’OIM (Office International pour les Migrations). Quand on est arrivés, ils nous ont encadré pour des formations dans l’entrepreneuriat chantier-école (…) après ça, le projet le plus important auquel j’ai participé est le projet ‘’Abobo ê zo’’ lancé par le maire Hamed Bakayoko », raconte-t-il.
Grâce à ce projet, Parker se retrouve à la chambre des métiers d’Abobo en qualité de maître peintre. Il conduit un groupe de jeunes dans la réalisation des travaux de ravalement de façades, d’embellissement et d’assainissement. 290 bâtiments au parc national du Banco, à la marie d’Abobo ainsi que dans plusieurs endroits sont repeints de belles couleurs : rose, turquoise, bleu, rouge, vert et jaune. Des œuvres à l’image de parker et son équipe. Pour lui, c’est une première grande bataille qu’il vient de remporter. Cependant, il faut viser au-delà. Son rêve : avoir son propre business.

Nouveau départ !

À N’Dotré, là où il réside, Parker ne peut passer inaperçu. Grâce à son enthousiasme et sa force de conviction, il entraîne un groupe de jeunes dans un système d’entrepreneuriat collectif. Avec eux, il tient avec eux un atelier de réparation d’appareils électroniques (radio, télévision, smartphone, ordinateur). S’il n’est pas en train de peindre, il répare des appareils électroniques. Ses amis (enfants, jeunes, adultes) et collaborateurs, vantent unanimement sa bonté et son sens du leadership. « Parker, c’est quelqu’un de bien. Quand il est dans un coin, il a beaucoup de créativité. À travers lui, on arrive à faire beaucoup de choses. Même absent, il nous oriente sur ce qu’on doit faire pour réussir.  C’est rare de voir un jeune créer un truc, rassembler d’autres jeunes pour contribuer et tirer profit ensemble », explique Sidibé Aboubacar, son collaborateur réparateur.

Pour servir de leçon…

À 18 ans, Parker devient voyageur clandestin. Sur le chemin de l’aventure, il devient esclave dans 4 grandes prisons. Dans le désert, certains de ses compagnons sont engloutis par des tempêtes sable. Le jeune homme a toujours en mémoire les atrocités faites aux Africains. Il vit l’échec de sa dernière expérience. Traverser la frontière de Tanger, ville située au Maroc pour rejoindre l’Europe. Dans sa lutte, il se fait déchirer et perd 9 veines.

Depuis son retour, dans des grins qu’il crée, il sensibilise sur les risques liés à la pratique de la migration clandestine et aborde les sujets d’entrepreneuriat et de citoyenneté. Il partage autour de lui son expérience. Sa cible en est touchée. Une dizaine de groupes. Des jeunes dont l’âge varie entre 16 et 35 ans. « J’ai vu des photos qu’il m’a montrées. J’ai compris que la vie, là-bas, est dangereuse. Il m’a expliqué beaucoup de choses. Et j’ai compris que c’est mieux de rester ici, d’entreprendre ici et de fonder sa famille ici (…) je n’encourage pas un jeune à prendre ce chemin », exhorte Konaté Adama, un habitué des rassemblements organisés par Parker à N’Dotré.

Sur le plan national, Parker participe à des campagnes de sensibilisation sur des projets de l’Office International pour les migrations (OIM) et de l’UNESCO, contre les risques liés à la pratique de la migration clandestine.

Durand N’Dri

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s